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lundi 24 août 2020

L'homme qui aimait les femmes

Née d’un mariage d’amour entre Bellaé la seconde fille du vicomte de Berry et Teddi Todoro le banquier de la petite communauté mêmbélé1 du duché, Hallaé était d’une grande beauté. Son visage en diamant aux pommettes haut placées, ses yeux en amande tirés vers le haut encadrant un nez légèrement épaté, son sourire révélant les canines acérées que ses lèvres charnues dissimulaient habituellement, sa sveltesse, la fluidité de sa démarche et la carnation de sa peau de métisse la firent surnommer la panthère noire. Mariée au banquier Ardi Mirdos, c’est elle qui prénomma leur fils aîné Jaeli. À l’époque c’était un prénom mêmbélé désuet, depuis c’est devenu le synonyme de séducteur.
Jaeli ressemblait énormément à sa mère, il n’avait hérité de son père que sa carrure, son nez droit et l’horizontalité de ses yeux.
Il fut un brillant étudiant, mais il devait ses résultats plus à ses facilités qu’à son travail. Il consacrait plus de temps aux loisirs estudiantins qu’aux cours. Il ne buvait pas plus d’alcool que la majorité de ses condisciples. Il fumait sensiblement moins de quiniquinick2, de marijuana et d’opium que les fêtards invétérés. Il recracha sa première chique de peyotl. Comment peut-on aimer un truc aussi amer qui retourne l’estomac ? s’interrogea-t-il.
Ce n’était pas la vertu qui motivait sa modération, mais l’importance qu’il attachait à sa tournure et en particulier à son haleine. Il passait beaucoup de temps en compagnie d’étudiantes, attirées par lui comme les abeilles par le lierre lors de la lune du même nom3.
De tout temps, il y eut des séducteurs et des séductrices sur le campus, mais seul Jaeli occupa une telle place dans la vie estudiantine. Les chroniques des sororités Liberta et Domina le mentionnèrent, quasiment chaque lune des quatre années que durèrent ses études.
Avant d’aller plus loin, il n’est pas inutile de rappeler qu’à peine vingt ans plus tôt :
En l’an 150, probablement sous l’influence de la duchesse, le duc mit fin à la campagne de peuplement malgré l’avis contraire du conseil des lords. Les femmes libérées du devoir de mettre six enfants au monde s’affirmèrent libres et maîtresses de leurs corps, les unes substituèrent à l’impératif de procréation l’abstinence, les autres le désir et la volupté. Elles firent renaître la pudeur et l’amour platonique, mais également la frivolité, le badinage et la séduction.
Jaeli était un beau jeune homme de cinq pieds dix pouces. Ses cheveux aile de corbeau, bouclés, perpétuellement dans un désordre duquel s’échappait un accroche-cœur, étaient une invitation à y plonger les doigts voire le minois. Selon leurs penchants, celles qui se miraient dans ses yeux de jais s’y admiraient ou s’y noyaient, mais toutes s’y perdaient.
Il eût pu être l’homme idéal s’il n’avait aimé les femmes. Il aimait leur compagnie, il aimait leur plaire, il aimait qu’elles le séduisent, il aimait les fasciner, il aimait partager avec elles, il aimait apprendre d’elles et leur apprendre, il aimait qu’elles l’aiment, il aimait être leur amant. En bref : il aimait aimer les femmes.
En mêmbélé, Jaeli signifie : aimé des dieux. Sans doute, avaient-ils été flattés que l’on fasse appel à eux, car ils furent généreux avec lui. Outre son charme et sa grande beauté, ils l’avaient doté d’une extraordinaire faculté d’adéquation aux attentes de celles qu’il courtisait, et de l’aptitude non moins singulière de leur faire priser l’éphémère de leurs amours.
Il aimait les femmes et elles le lui rendirent au centuple.
Dans les résidences Liberta et Domina, on dissertait du goût de ses lèvres ou de sa peau, de son odeur, de ses étreintes. On partageait des souvenirs, dévoilait des espoirs. On comparait ses différentes facettes, romantique, assurée, douce, énergique, tendre, sauvage, etc. On frissonnait s’imaginant lovée contre son corps, fondait à l’idée de l’enserrer, s’égarait brûlante de désir. Jaeli était l’objet d’une compétition entre ces confréries rivales, celles des leurs qui furent ses maîtresses arboraient un ruban ocre rouge sur l’épaule.
Dans la résidence Vertua, son nom fut souvent mentionné lors des cérémonies décadaires de contrition. Ces assemblées de jeunes femmes en chemise de drap avaient quelque chose de profondément troublant. À tour de rôle, chacune se levait, se rendait à l’estrade, faisait face aux autres et confessait ses pensées impudiques et ses rêves luxurieux – dans un silence régulièrement souligné par le frottement du tissu, tantôt sur un siège, révélant un changement d’assise, tantôt sur des jambes qui se croisaient et se décroisaient aussitôt. Les sœurs qui passaient à l’acte étaient exclues de la sororité, celles qui l’avaient fait avec Jaeli étaient courtisées par Liberta et Domina toujours à la recherche d’un ruban supplémentaire.
Jaeli fut licencié en droit des affaires le dernier jour de la lune du chêne de l’an 174. Dès le lendemain, son père lui confia la direction de la branche crédit de la banque familiale.
Son activité professionnelle lui prit plus de temps que les études, sa vie mondaine fut moins agitée que celle qu’il eut menée sur le campus. Ses amours furent moins nombreux, mais ils le furent suffisamment pour inciter son père à anticiper un projet qu’il chérissait depuis longtemps. Un soir de la lune du sorbier au milieu du dîner familial, il le lui présenta comme une évidence, tout du moins il le tenta.
***
« Jaeli, mon fils, tes fredaines sont sur toutes les lèvres…
— Hi ! hi ! hi ! hi ! s’esclaffa la cadette de Jaeli.
— Linaé, pourrais-tu m’expliquer ce qu’il y a de drôle ? la réprimanda Ardi.
— Mon chéri, ne cherche surtout pas à comprendre, lui répondit Hallaé, en couvrant la main de son mari de la sienne.
— J’peux t’expliquer, moi, papa, s’exclama Romi, le benjamin en se trémoussant sur sa chaise.
— Sûrement pas, répliqua Hallaé, à moins que tu ne veuilles sortir de table !
— Ben non alors ! j’sais pas pourquoi, mais j’sens qu’on va bien… commença l’espiègle garnement.
— C’est bientôt fini ces pitreries, le coupa le chef de famille en frappant la table de sa main libre.
— On t’écoute chéri, qu’as-tu à nous dire ? l’apaisa Hallaé d’une pression de la main.
— Jaeli, tu ne peux continuer à te comporter comme un étalon sauvage au milieu de sa harde. Que dans tous les clubs, on me parle de tes bonnes fortunes ne suffisait pas. Maintenant, tout le monde fait des gorges chaudes des cornes que tu as fait pousser sur le front de l’un de nos clients…
— Père…
— Non ! laisse-moi finir. Que ce soit lui qui ait demandé à son épouse de te séduire pour obtenir un crédit…
— Mais pè…
— Tais-toi, je sais pertinemment que tu ne lui as pas accordé de prêt. Cette dame a clamé, à la cantonade, qu’outrée par la requête de son mari, elle s’est vengée en s’offrant à toi sans autre contrepartie que le plai… ne change rien. Ça ne peut plus durer. »
Jaeli écarquilla les yeux en haussant les épaules et écarta les mains, paumes en l’air. Geste explicite, se substituant souvent à de longs plaidoyers qui se seraient conclus par le sempiternel : que pouvais-je faire d’autre ?
Profitant de cet instant de silence, le trublion de service interrogea :
« Dis p’pa, c’est quoi une contrepartie et un plai ?
— Romi ! le prévint sa mère, sourcils froncés.
— On parle aussi de lui à l’université, glissa subrepticement Linaé par solidarité avec ce dernier.
— Et que dit-on de lui ? eut la maladresse de questionner Ardi.
— Que c’était un artiste ! » gloussa-t-elle.
— Un musicien, un peintre ou un poète ? s’enquit Romi. »
Simultanément, Ardi et Romi se demandèrent où elle voulait en venir, Jaeli le devina et Hallaé le redouta. Avant que cette dernière n’ouvre la bouche, Linaé débita le plus rapidement possible :
« Pas tout à fait comme les autres, on raconte qu’il ne trouvait pas l’inspiration dans l’ivresse de l’absinthe, mais dans celle de la cyprine… comme sa sœur !
— Il faut Dis, Linaé, toujours c’est enfin, que quoi pas tu rapportes l’absinthe devant tout et ton à ton la petit orientation cyprine frère !?! s’exclamèrent simultanément Ardi, Romi et Hallaé dans un brouhaha incompréhensible4.
— Alleni ! Linaé et Romi finiront leur repas à l’office ! signifia Hallaé au majordome. »
Alleni tira à trois reprises sur l’un des fils d’archal, puis se rendit auprès de mademoiselle Linaé, afin de remettre sa chaise en place après qu’elle se fut levée.
À l’office le marteau frappa trois fois le timbre d’appel. Deux des femmes attablées saisirent chacune un plateau vide et s’empressèrent. Lorsqu’elles atteignirent la salle à manger, les exilés s’apprêtaient à sortir, n’ayant pas prononcé un mot depuis que la sentence était tombée.
« Mademoiselle Linaé et monsieur Romi termineront leur dîner à l’office, » notifia Alleni aux servantes, lesquelles débarrassèrent rapidement les couverts des deux jeunes gens avant de s’éclipser, alors que le majordome avait regagné sa place, le long du mur à côté des cordons.
« Écoute ton père, jusqu’au bout, s’il te plaît, plaida Hallaé.
— Comme je te disais, tes multiples aventures vont finir par nous brouiller avec, des pères, des frères, des fiancés, voire des maris ; mais aussi avec celles que tu as ignorées et celles qui espéraient te garder. Tu vas nuire à nos affaires. Alors, il est temps de te marier !
— Quoi ? s’exclama Jaeli, atterré. Me marier ? Mais avec qui ?
— Avec Amilaé Rochier, son père est d’accord ! révéla Ardi rayonnant.
— Mais mais. C’est pas un mariage ça, en tout cas ce n’est pas le mien avec Amilaé, c’est celui de ta banque avec celle de son père.
— Ne sont-ce point les mariages de raison qui durent le plus longtemps, qui déçoivent le moins, qui satisfont le plus les deux époux ? Ta mère et moi, ne sommes-nous pas parfaitement heureux ?
— Oui mon amour, mais le nôtre c’est un mariage de raison qui a dégénéré en mariage d’amour5, tempéra Hallaé.
— Ah ! tu vois, vous êtes une exception, s’engouffra Jaeli dans la brèche ouverte par sa mère. De toute façon, je n’ai pas l’intention de me marier, pas plus par amour que pour te permettre de représenter la finance à l’assemblée des lords !
— Quelle est la place de la banque dans tes projets ? Hein ? tu peux me le dire ? s’indigna son père. Tu hériterais de la nôtre, de celle de ton grand-père et de celle de ton beau-père, tu serais l’homme le plus influent après le duc !
— Ça, c’est ton rêve, père, pas le mien. Prêter aux plus riches l’argent de ceux qui en ont un peu, pour que les premiers soient plus riches, et que les seconds n’aient plus ce peu qu’ils possédaient. Ce n’est pas mon aspiration.
— Et Rochier ! Qu’est-ce que je vais lui dire moi à Rochier, que sa fille est assez bonne pour partager ta couche, mais pas assez pour être ta femme, parce qu’il sait ! s’étouffa Ardi outré.
— Si je devais épouser toutes celles qui… Les dieux me jalouseraient, répliqua le fils sarcastique. Tu devrais faire cette offre à Linaé, elle serait ravie de s’unir à Amilaé, laquelle ne dirait pas non, j’en suis sûr !
— Jaeli, ça suffit, vous allez m’écouter tous les deux, ordonna Hallaé. »
Personne à Nouvelle Vernes ne tenait tête à la panthère noire. Quoi qu’elle demande, quoi qu’elle exige, nul n’osait lui dire non. Épouse fidèle, amante ardente, femme aimante, Hallaé avait une seule faiblesse, son aîné. Elle aimait ses trois enfants, elle aurait donné sa vie pour chacun d’entre eux, mais il y avait au fond de son cœur ce minuscule petit supplément d’amour qu’en bonne mère, elle tentait d’isoler en l’enveloppant d’un voile de raison, puis d’un autre, d’un autre... La raison comme de la nacre fit naître une perle noire dont l’orient irisait ses yeux lorsqu’ils se posaient sur aimé des dieux. Aussi, quel que soit l’intérêt de la famille, elle n’envisagea pas un instant de lui imposer un mariage qu’il ne désirait pas.
Fils et mari attendaient en silence qu’elle reprît la parole, tous deux ignoraient si elle réfléchissait encore ou si elle attendait que la tension qui les avait habités soit retombée, mais tous deux savaient qu’ils se plieraient à sa décision.
« Jaeli, ton père a raison, tes aventures finiraient par nous affaiblir si tu restais à un poste de responsabilité de la banque. Mon chéri, force nous est de constater qu’un poste à la banque ne le satisfait pas et qu’il apporterait plus de tracas que d’avantages s’il restait membre la direction de celle-ci. Il doit donc la quitter ! elle fit une pause, puis répondant à l’attente de ses interlocuteurs, elle continua. Jaeli, je crains qu’actuellement l’université ne rechigne à te proposer un poste d’enseignant. J’espère qu’une vie d’oisiveté ne t’attire pas. Je pense que quelques années dans l’armée te seraient salutaires, à moins que tu n’aies une autre idée. Qu’en penses-tu ?
— Pourquoi pas l’armée ? Maman, l’aventure me tente assez, s’empressa-t-il d’acquiescer.
— Chéri, ton fils a raison, de tous nos enfants, c’est Linaé qui est la plus apte à te succéder un jour. Elle a hérité de ton ambition, elle est avide de pouvoir. Évidemment, même si elle ne les rend pas impossibles, son homosexualité ne favorisera pas les rapprochements. Mais elle trouvera d’autres axes de croissance. Crois-moi, un jour je serais la vieille panthère, et la jeune régnera sur les finances du duché. »
Ardi réfléchit pour le principe. La jeune panthère – c’est ainsi que tous l’appelaient hors de sa présence, tant elle ressemblait à sa mère au même âge – terminerait ses études dans deux ans. Si les relations se tendaient avec Rochier, il débaucherait son actuaire pour remplacer Jaeli. Sinon, on verrait bien. Il donna son accord, ce dont personne ne doutait.
***
Trois jours plus tard, l’aspirant Mirdos commençait sa formation militaire à l’École Des Officiers de Cavalerie.
À 11 heures, le 12e jour de la lune de l’Aubépine de l’an 175, Hallaé reposa L’Écho de Nouvelle Vernes sur un guéridon et fit quérir sa calèche.
À midi elle déjeunait avec ce cher Alexi, accessoirement général et conseiller du duc.
À huit heures, le lendemain, la panthère noire inspectait son rejeton des pieds à la tête : bottes noires, pantalon bleu nuit à bandes latérales dorées, dolman bleu nuit à brandebourgs dorés, bandoulière et ceinturon de buffle blanc ainsi que les deux bélières de sabre, rien ne lui échappait. Pourtant aveuglée par l’amour maternel, elle ne voyait pas ce que les femmes verraient. Elle tournait autour du couple formé par son fils et le maître tailleur. Après avoir posé une dernière épingle, ce dernier se recula, attendit le hochement d’Hallaé. Puis il installa la pelisse rouge – à brandebourgs dorés – bordée d’hermine blanche sur l’épaule gauche de Jaeli, et plaça le shako noir à plumet noir et rouge sur la tête du jeune homme et rectifia le tomber du cordon doré sur la visière.
« C’est parfait, je compte sur vous, tout sera prêt après-demain !
— Bien sûr Madame Mirdos ! Mes meilleures couturières s’y appliqueront ! » assura-t-il en aidant Jaeli à se dévêtir.
Le 20e jour de la lune de l’Aubépine, bien qu’il n’ait suivi la formation d’officier de cavalerie qu’à peine trois lunes, Jaeli promu sous-lieutenant prit son service au palais. Entre escortes et gardes d’honneur, il n’était de service que six à huit heures par jour, neuf jours par décade. Dans un palais truffé de passages secrets, dont le seul usage était de dissimuler les visites galantes, précisons que la duchesse était irréprochable. Bien que son époux collectionne les favorites, jaloux, il n’aurait point toléré la réciproque. C’était une femme au physique ordinaire, elle n’était pas « ni ceci ni cela », elle était juste banale. Mais femme d’esprit pourvue d’une grande intelligence, mine de rien cette fine manœuvrière dirigeait le duché.
En ce lieu que l’on pouvait qualifier de Palais des désirs. Jaeli fut bien vite aussi adulé qu’il l’était à l’université. Son nom était dans toutes les bouches, y compris dans le salon du duc.
« Qui peut donc bien être ce Jaeli, dont nombre de dames s’abouchent en murmurant, s’enquit Loui XVe du nom.
— Comment, vos tendres amies ne vous ont pas entretenu du fils de celle qui osa se refuser à vous ? le taquina la duchesse.
— Mais de qui parlez-vous, ma mie ?
— Mais de la panthère noire, bien entendu ! révéla malicieusement la douairière.
— Hum ! ah ! oui celle-là ! si j’avais vou… grommela-t-il à l’adresse de sa mère.
— Le charme de son héritier éclipserait-il le vôtre, mon pauvre ami ? questionna innocemment la duchesse.
— Le charme de l’uniforme plutôt, on dirait un sucre d’orge bleu, rouge et or que l’on agiterait devant des fillettes.
— Je me suis pourtant laissé dire au sujet de son uniforme que ce qu’elles préféraient c’était le lui ôter ! » commenta la douairière pour sa complice la duchesse.
Après ces quelques piques, le duc bouda toutes les conversations dont Jaeli était le sujet. Il ne prononça plus son nom avant le 22e jour de la lune de la vigne. Quand il convoqua le colonel Dubosis et lui asséna : « Colonel, vos officiers sont-ils censés assurer notre sécurité ou trousser tous les jupons qui passent devant eux ?
— Monsieur le Duc, parle sans doute du sous-lieutenant Mirdos ? hasarda le colonel.
— Et de qui d’autre pourrais-je bien parler, avez-vous d’autres sabre au clair dans votre régiment ?
— Non, Monsieur le Duc, non !
— Non, quoi ? insista Loui se délectant de la gêne de son interlocuteur.
— Non il n’y en a point d’autre heu ! il n’y en a pas d’autre comme lui…
— Vous trouvez donc son comportement approprié, l’interrompit le duc ravi de se défouler.
— Non, Monsieur le Duc, bien sûr que non, mais c’est le général qui…
— Et moi je suis votre Duc, le coupa-t-il à nouveau, vous allez m’envoyer cet olibrius séduire les sauvageonnes à Rimaton, et avec un peu de chance, il nous ralliera quelques gabières6.
— Mais sa mère, Monsi…
— Que le général Du Chantour se débrouille avec elle ! » conclut-il jubileur7.
Dans l’édition du soir de L’Écho de Nouvelle Vernes, dans la rubrique « les indiscrétions de madame Cancan » on put lire l’encadré suivant :
Bureau de recrutement ?
Je suis en colère, et je sais que vous êtes nombreuses à l’être.
La question se pose, madame la baronne : Bel Antre ou bureau de recrutement de Rimaton ?
Beaux officiers méfiez-vous ! On vous invite à entrer dans l’un et vous ressortez de l’autre alors que votre paquetage vous attend.
Maintes d’entre nous regrettent le départ du sous-lieutenant. Oui, j’ai eu le plaisir d’en partager avec lui. N’espérez pas trop, baronne, pouvoir m’identifier grâce à cette confidence, nous sommes une multitude. Et pour être tout à fait franche avec vous chères amies, j’en aurais volontiers repris une lichette.

***

Notes :
1) Les Mêmbélés avaient la peau brune, presque noire ; ils étaient grands et minces, taillés pour la course ; dans les temps anciens, ils vivaient dans le sud d’Infri.
2) Quiniquinick ➢ Mélange aromatique de tabac et d’herbes (foin d’odeur, sauge, menthe, les feuilles ou l’écorce de cornouiller stolonifère, sumac rouge, laurier, cœurs gorgés d’amour, le sud de groseille, tabac indien [lobelia inflata], écorce de cerisier et molène {pas toutes en même temps}) que les Autochtones fumaient dans les calumets.
3) Lors de la lune du lierre – période de l'année où une grande partie des floraisons sont arrivées à terme – celui-ci est en fleur. Très riches en pollen et nectar ses fleurs attirent les abeilles comme aucune autre plante.
4) Le brouhaha ➢ Ne vous plaignez pas, j’aurais pu superposer les trois phrases. Ah ! mais non, ce serait compliqué à réaliser.
5) M. A. de Bovet, « Le mariage de Geneviève », Lectures pour tous, mars 1904.
6) Gabière ➢ membre des unités féminines de reconnaissance et de renseignement de l’Amirauté.
7) Jubileur ➢ adjectif, qui grâce à moi – si personne ne m'a précédé – n’est plus un hapax.

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 ou 

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